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Huîtres et lait, deux ingrédients d’un même plat au goût amer?

29 novembre 2017. Lors du congrès tenu à Victoriaville, nous avons eu l’occasion de rencontrer Patrice Vidieu, de la Confédération paysanne, l’organisation cousine de l’Union paysanne en France. Évidemment, il a abordé la question de notre système de gestion de l’offre, système qui a aussi existé en Europe jusqu’à tout récemment. Sans vouloir étaler ici tout le fond de sa pensée, j’ai surtout retenu une phrase. Selon lui, avec les quotas et les plans conjoints, nous avons certes réussi à maîtriser l’offre de quelques denrées agricoles, mais nous n’avons jamais réussi à maîtriser la répartition. Le système ne profite pas à tout le monde de la même façon, loin de là.

L’été dernier, je me suis permis une escapade en haute Gaspésie. J’avais le goût de dépaysement, de vivre la mer. J’ai donc apporté ma canne à pêche et mon goût pour des aliments plus difficiles à dénicher dans mon patelin, comme les fruits de mer. J’avais donc envie de goûter les palourdes, les moules et les huîtres, ou encore le crabe ou le homard. Je ne suis pas sûr que la naïveté soit encore une qualité à mon âge. Quoi qu’il en soit, j’ai vite découvert que la cueillette de tous ces mets était prohibée. Il y a bien sûr les affiches de Pêche Canada, disséminées sur le littoral, qui ne font pas que nous rappeler à quel point ces produits sont dangereux pour ma santé mais qui vont même jusqu’à me menacer d’amendes si j’ose y toucher. J’ai ensuite pris la peine d’en discuter avec les habitants du coin qui m’ont surtout informé du fait que la cueillette n’était pas interdite pour tous, mais plutôt pour tous les mortels ne détenant pas de quota de pêche. En somme, exactement le même système que dans la production laitière, les œufs, le lapin ou la volaille, où l’accès à la ressource est réservé à certains individus, avec l’aval des autorités. Il y a des substances bien plus toxiques que des huîtres fraîches sur les plages du Québec, sans que le gouvernement intervienne avec pancartes et menaces.

La même situation prévaut sur les quais, où une stricte surveillance est exercée à l’endroit des pêcheurs à la ligne attrapant une morue ou un bar rayé, alors que tout le monde sait que ce ne sont pas les quelques pêcheurs festifs du samedi soir qui ont exterminé les bancs de morue de la mer.

On peut comprendre l’utilité de contrôler la production agricole ou la récolte des produits marins. Mais on pourrait quand même permettre une petite marge de manœuvre pour la cueillette artisanale, surtout dans une région comme la Gaspésie, dont les habitants se voient bloquer de plus en plus l’accès à la mer. Après un demi-siècle de quotas et de plans conjoints, nous n’avons toujours pas maîtrisé la répartition des ressources. Notre système de gestion de l’offre doit évoluer.


Maxime Laplante, président de l’Union paysanne