22 septembre 2017.
Dans les derniers jours, en sortant de mes ruches, j’ai pris le temps de lire les pensées profondes de Christian Overbeek, président des Producteurs de Grains du Québec, et de Jacques Cartier, président du Conseil des Entrepreneurs Agricoles, dans le dossier des néonicotinoïdes.
Tandis que le premier s’oppose à la volonté du ministère de l’Environnement du Québec de bannir les néonicotinoïdes en plus de se commettre dans une lettre d’opinion niant leur lien avec la mortalité des abeilles, le second n’hésite pas à affirmer dans une entrevue : « On va les utiliser tant et aussi longtemps qu’on aura des recommandations agronomiques pour nous permettre de le faire. »
Je le dis sans détour, de tels propos en 2017 m’apparaissent déphasés et d’une autre époque. Il suffit un tant soit peu de s’intéresser à l’agroalimentaire pour réaliser que les pesticides sont désormais pointés du doigt par tant de recherches qu’il n’est plus possible de nier leurs impacts sur la biodiversité et sur la santé humaine, des sols et de l’eau.
Seulement pour parler des néonicotinoïdes, le Groupe de travail sur les pesticides systémiques rendait public cette semaine une révision de plus de 500 études parues en trois ans. Le verdict est sans nuance. En plus d’être toxique pour les abeilles, cette classe de pesticide l’est pour certains invertébrés comme les vers de terre et pour les invertébrés aquatiques.
Je ne pointerai jamais du doigt un agriculteur pris dans une spirale dans laquelle les alternatives aux pesticides ne sont pas toujours accessibles, mais je ne mâcherai jamais mes mots devant des supposés leaders du monde agricole qui ne nous préparent pas pour demain en niant la science. Les pesticides sont des poisons auxquels nous devons collectivement trouver des alternatives.
À mon avis, il est temps de faire preuve de bon sens en bannissant en premier lieu les néonicotinoïdes au Canada. Le gouvernement Québécois doit dès maintenant faire preuve de courage en encadrant de façon stricte l’utilisation de pesticide. Ce resserrement ne pourra être viable qu’à la condition de développer des incitatifs et un soutien réel aux agriculteurs qui voudraient passer au bio.
Monsieur les leaders agricoles et gouvernementaux, en terme d’agroécologie, il est temps de se réveiller. Peut-être que si l’agriculture passait dans le ministère de la santé, il deviendrait évident « que ton aliment soit ton premier remède*».
Benoit Girouard, président Union paysanne
*Hippocrate, père de la médecine