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Lieu des assemblées. Photo: Charles Bois

De retour, le délégué de l’Union paysanne partage son expérience au Pays basque!

En juillet dernier se tenait à Derio, au Pays basque, la 7ème conférence internationale du mouvement paysan mondial La Via Campesina. Le délégué de l’Union paysanne raconte ses impressions et partage avec nous les grands enjeux qui secouent les mouvements paysans du monde entier, réunis pour l’occasion dans un climat sans aucun doute mobilisateur! Notre délégué, Charles Bois, 25 ans, est paysan au Saguenay-Lac-Saint-jean. Il produit des semences ainsi qu’une production diversifiée de légumes, de fruits et quelques élevages. Il est entrepreneur social, impliqué pour la souveraineté alimentaire, l’innovation sociale en agriculture et la gouvernance territoriale par, pour et avec le peuple.

 

Rapport de Charles Bois:

Lieu de la 7ème conférence de LVC, photo Charles Bois

Avant tout, je tiens à remercier l’Union Paysanne et les membres du comité international qui ont rendu mon implication possible. Ce fut un plaisir de représenter notre organisation riche de  ses valeurs à la plus haute instance décisionnelle de LVC et d’y côtoyer les paysans, paysannes et activistes de 79 pays, 164 organisations représentants plus de deux cent millions de membres. J’y ai participé au meilleur de ma personne pour représenter l’intérêt de nos membres.
L’Union Paysanne relève de la région Amérique du Nord à l’intérieur de LVC. Avant la VIIe Conférence Internationale, j’avais participé à la rencontre régionale préparatoire pour cette dernière et à une rencontre pratique d’agroécologie à Porto Rico. Au Pays-Basque en juillet dernier, j’ai participé activement à l’assemblée des jeunes, en tant qu’observateur à l’assemblée des femmes et de manière plus indirecte et à l’assemblée principale. Notre délégation d’Amérique du Nord était composée de 12 délégué-e-s provenant du Québec et du Canada, des USA et du Mexique.
Cette expérience a été très riche sur le plan humain; on rencontre des gens de partout et on tisse des liens avec les acteurs du mouvement en prenant connaissance du vécu de chacun par l’entremise d’échanges personnels et aussi par le déroulement des activités sur les lieux de la conférence à l’ancien séminaire de Derio. Ce fut également très riche d’un point de vue organisationnel. La via campesina est un mouvement d’envergure mondiale, de luttes globales, porteur de campagnes importantes pour les femmes et les hommes membres des organisations partout dans le monde. En tout quelques 500 délégués, une centaine d’invités, une équipe technique et une autre pour la traduction et de nombreux bénévoles ont participé et ont assuré le bon déroulement de la VIIe Conférence Internationale. C’est donc près de 1000 personnes qui ont participé à cet événement!
Ce fut un événement très chargé s’étalant sur neuf jours où l’on participait aux assemblées nous concernant et à celles qui nous intéressaient si notre arrivée sur les lieux le permettait. Au fil des jours on participait aux rencontres régionales et aux rencontres spécifiques, aux collectifs de travail le soir en plus des diverses activités culturelles organisées par l’organisation hôte Ehne Bizkaia. L’objectif de la conférence étant d’avoir un regard sur les quatre dernières années et d’établir les lignes directrices pour les quatre prochaines années. C’était un moment de faire le point sur comment se portent nos luttes et nos campagnes ainsi que les travaux effectués par les collectifs de travail face au système et aux pressions des protagonistes du secteur agroindustriel pour accroître leur emprise.
Voici quelques-unes de mes impressions et réflexions par rapport à cet événement mémorable auquel j’ai participé en tant que délégué officiel de l’Union paysanne.

La 4ème assemblée des jeunes

Au début de la conférence se trouvait l’assemblée des jeunes regroupant les délégués de quarante ans et moins présent. La majorité des jeunes étaient âgés entre 30 et 35 ans. L’assemblée des jeunes est une occasion de faire connaissance, de se préparer et de débattre afin de nous préparer pour l’assemblée principale. C’est un moment pour établir nos priorités et soumettre des points à l’horaire de l’assemblée principale. Ainsi, nous avons participé à des activités pour mieux faire connaissance et puis avons enchaîné avec ce que nous croyons être le rôle des jeunes dans nos organisations et au sein de la société. Il a notamment été mentionné que pour avoir une représentation dans la société et pour répondre aux enjeux nous concernant, que nous devons occuper des postes décisionnels.
L’absence de relève agricole est un enjeu répandu à travers toutes les régions et c’est définitivement un sujet auquel nous devons mettre de l’énergie. Comme tout au long de la conférence, le développement des écoles d’agroécologie paysanne a été un point clé, voire la solution concrète à partir de laquelle nous pouvons tout réunir pour répondre à cette problématique majeure de la relève. Pour sensibiliser la population, former les gens au niveau politique, organisationnel et pratique, les écoles d’agroécologie sont une occasion pour nous d’augmenter la masse critique, de valoriser la paysannerie et de promouvoir la souveraineté alimentaire comme solution au capitalisme néolibéral patriarcal.
Nous devons faire preuve d’audace et de courage pour créer un sentiment de pouvoir et mobiliser les gens!

La cinquième assemblée des femmes

L’assemblée des femmes est très importante au sein de La Via Campesina, les femmes sont certainement la solution pour contrecarrer le capitalisme patriarcal. Elles sont d’ailleurs souvent les plus touchées par ses conséquences, et constituent ses victimes les plus vulnérables. Les femmes sont celles qui cultivent la terre traditionnellement depuis des milliers d’années. Nos organisations doivent être féministes, permettre aux femmes de s’impliquer en facilitant leur rôle de mère pour celle qui le sont, en offrant un service de garde par exemple, et faire preuve d’équité pour que des femmes occupent des postes décisionnels.

Lieu des assemblées. Photo: Charles Bois

Les contextes sociaux sont forts différents et la réalité des femmes dans différents pays l’est tout autant sinon plus. Quelle que soit notre situation, nous devons avoir à l’esprit que pour mener des luttes globales, nous devons faire preuve de solidarité. La solidarité et l’espoir, deux mots forts au sein de La Via Campesina. Ainsi, des moyens doivent être pris pour conscientiser la société, autant les femmes que les hommes, sur la situation des femmes et leurs luttes partout sur la planète. Les écoles d’agroécologie où des formations politiques sont et seront données devraient avoir un contenu féministe. Les hommes doivent faire place aux femmes, nous devons nous ouvrir à leur cause, faire preuve de compréhension, admettre nos torts et construire ensemble une société riche de valeurs.

L’assemblée principale

Dans une immense salle remplie de chaises entassées les unes sur les autres, on assiste aux présentations. D’abord, la première journée : l’histoire. Les présentations des délégations régionales et la ratification des nouvelles organisations membres, puis sur le contexte politique international. Le lendemain : le présent. Les contextes et la situation par continent furent présentés, suivirent des ateliers sur les différents collectifs de travail et ensuite leur récapitulatif sur l’historique du mouvement avec entres autres des initiateurs du mouvement, les différentes régions, les déclarations de l’assemblée des jeunes et celle de l’assemblée des femmes, à des appels de solidarité, de paix et de justice sociale, aux défis de LVC et à la déclaration politique. La Déclaration de Euskal Herria est le grand résultat de cette rencontre international, elle se trouve sur le site web de La Via Campesina et de l’Union paysanne.

Conclusion

À mon avis, l’Union Paysanne est très bien positionnée pour mener les luttes de La Via Campesina. Nous sommes forts d’une raison d’être et d’une situation globale insensée en agriculture et au sein de notre société de consommation. Nous avons la légitimité d’exiger la pluralité syndicale et de dénoncer le statut quo en agriculture. Il faut, plus que jamais, être de l’actualité et établir une stratégie pour sortir gagnant de nos interventions. Le Centre Paysan est un joyau que nous devons alimenter et développer pour adresser les enjeux et les campagnes qui nous définissent. Profitons-en!
Il y a une magie humaine qui se créé lors des événements de La Via Campesina. On se retrouve entre frères et sœurs pour mener un combat en faveur des valeurs de justice sociale; nous luttons pour reprendre le contrôle de nos communautés : d’un côté on veut nous asservir et de l’autre nous voulons nous libérer et être souverains. Nous faisons face à un mur, peut-être avons-nous le visage dedans. Ce mur peut être une limite, ça peut être une vague aussi. Une vague prête à s’écraser. Nous pouvons nous situer sur cette vague, faire en sorte de tenir entre nos mains le sort de l’humanité. Ensemble nous sommes forts, ensemble au sein de nos organisations et entre elles, par nos valeurs communes et nos convictions, nous sommes forts. Nous devons être prêts à livrer bataille et pour cela nous devons connaître notre ennemi et connaître sa puissance. Nous devons être au courant des moyens de répressions et de manipulations qui sont et qui peuvent être utilisés. Et on doit en parler. Parler de notre cause, de notre raison d’être, de notre vision. C’est à nous d’être au front et d’interpeller les médias, les gouvernements et la société civile. Pour que les enjeux soient adressés, mieux vaut une société intéressée à faire partie de la solution et désireuse d’avoir du pouvoir sur son devenir.

Globalisons les luttes!!!

Globalisons l’espoir!!!

Paysages du territoire de Euskal Herria (Pays basque). Photo Charles Bois.