Depuis plusieurs années, l’Union paysanne plaide pour une ouverture du droit de produire, afin de permettre aux petits éleveurs de vendre plus de 99 poulets par an, ou plus de 24 dindons, ou la vente d’œufs de plus de 100 poules, sans avoir à payer les fabuleux quotas et subir les contrôles des fédérations de l’UPA. Il ne s’agit pas d’une utopie, alors que les autres provinces canadiennes sont nettement plus tolérantes que le Québec.
Récemment, la Régie des marchés agricoles a accepté la demande de l’Union paysanne d’être entendue dans ce dossier. Au mois de juin, il y aura une rencontre de gestion, afin que les différents intervenants puissent discuter de la logistique de la séance publique qui aura lieu vraisemblablement à l’automne.
À première vue, on aurait pu s’attendre à ce que la demande d’avoir le droit de commercialiser 2000 poulets, ou les œufs de 300 poules, passe comme une lettre à la poste, alors que tout le Québec réclame des aliments de proximité, locaux, directement du fermier, etc. Et bien non. L’UPA et ses fédérations défendront leur contrôle bec, ongles, griffes et serres dehors, refusant de céder le moindre espace à une mise en marché leur échappant. Ces intervenants tenteront de convaincre la Régie que cette ouverture constituerait une grave menace pour l’industrie agricole québécoise, alors qu’il ne s’agirait que d’environ 1 % de la production. Pendant ce temps, l’UPA clame dans les médias que les grandes chaînes ont trop de pouvoir, tout en faisant tout pour bloquer la diversification de la production. Une sorte de double discours.
Les filiales de l’UPA viendront également tenter de convaincre les régisseurs du danger de la salubrité des petits élevages, qui serait selon eux une menace pour l’image de marque des élevages industriels. Argument fallacieux. En quoi un poulet hors-quota passant par l’abattoir serait-il plus toxique qu’un poulet sous quota ayant passé par l’abattoir? Et quiconque a déjà acheté des œufs directement du fermier connaît la différence de qualité à l’avantage des petits élevages. Le récent rapport CIRANO de l’Université Laval s’est clairement prononcé sur ces questions, à savoir qu’une ouverture ne provoquerait aucune déstabilisation du marché, pas plus que dans les autres provinces plus permissives. Selon ce rapport, la question de la salubrité ne tient pas la route non plus.
Ce débat devant la Régie sera un affrontement face au monopole de l’agriculture, qui fera tout pour protéger ses fiefs, au déni des intérêts de la population du Québec et des gens qui rêvent d’un autre modèle agricole. En somme, l’Union paysanne s’opposera contre l’organisation qui affirme la représenter…
Maxime Laplante, agr, président