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L’UPA, l’éléphant dans la pièce

On me reproche parfois de faire du « UPA-bashing ». Je trouve au contraire que prétendre vouloir parler d’agriculture au Québec ou de souveraineté alimentaire en évitant soigneusement de mentionner l’UPA, c’est un peu comme de vouloir décrire un salon en oubliant de parler de l’éléphant qui se trouve au centre. Après presque 50 ans de monopole et de contrôle quasi absolu sur notre agriculture, il faut reconnaître la lourde part de responsabilité de l’UPA dans la dépendance de notre agriculture, autant en exportation qu’en importation, en spécialisation, en disparition des fermes.

Le double discours constant

D’un côté de la bouche, on vante notre force de travail en tant qu’agriculteurs et de l’autre, on affirme que ça prend deux Québécois pour être aussi efficace qu’un travailleur étranger (Marcel Groleau, lapresse.ca, 7 avril 2020). Je ne sais pas pour vous, mais je n’apprécie pas beaucoup que celui supposé me représenter du haut de son monopole émette ce genre de propos raciste à mon endroit.

Encore en décembre, l’UPA louangeait l’exportation et la conquête des marchés (congrès, déc 2019) et prétend aujourd’hui s’être toujours préoccupée de mise en marché locale. Sans oublier le fait que l’UPA a quand même embauché des avocats pour bloquer nos requêtes de vente directe d’oeufs, de poulet et de dindon devant la Régie des marchés agricoles. Avocats payés avec nos cotisations de fermiers, en outre…

Une absence louche

Avec tout le pouvoir dont dispose l’UPA, on peut se demander pourquoi cette organisation ne s’est jamais attaquée aux enjeux de l’agriculture de proximité. Par exemple, il aurait été simple de demander le remboursement des certifications bio, ce qui représenterait à peine 2 ou 3 millions, alors qu’elle a obtenu sans peine les milliards pour développer une agriculture d’exportation reposant sur les subventions du porc et du maïs. La Régie aurait plié rapidement, comme d’habitude, si l’UPA avait demandé une hausse de la production hors-quota pour permettre la mise en marché directe à faible volume. Il y a fort à parier que nous aurions encore une multitude de petits abattoirs en région si l’UPA avait plaidé en ce sens.

Dans son rapport remis à la commission Pronovost, la notoire commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) recommandait vivement une diversification et une multifonctionnalité de l’agriculture. Elle terminait son rapport en mentionnant l’opposition de l’UPA à ce projet.

En tant que fermiers, nous avons écrit à l’UPA pour réclamer un soutien pour notre agriculture de proximité. Sans réponse. Le monarque ne négocie pas avec ses sujets…

Ce qui empêche notre agriculture de s’adapter, d’évoluer, de contribuer à une véritable souveraineté alimentaire, ce ne sont pas les « forces du marché » ou une quelconque volonté céleste. C’est clairement le carcan de l’UPA, ce qui incitait Jean Pronovost à conclure que le Québec agricole manquait d’oxygène. Vous voulez un véritable changement en agriculture? Ça passe obligatoirement par la fin du monopole de l’UPA.

Maxime Laplante, agr, président